La base de l’intérêt légitime.

L’intérêt légitime représente l’un des six fondements juridiques sous-jacents au traitement des données à caractère personnel, etant réglementé à l’art. 6 (1) f) du Règlement (UE) 2016/679 (RGPD). Ainsi, selon cet article, le traitement est nécessaire à la finalité des intérêts légitimes poursuivis par le responsable du traitement ou un tiers, à moins que ne prévalent les intérêts ou les droits et libertés fondamentaux de la personne concernée, qui nécessitent la protection des données à caractère personnel, notamment lorsque la personne concernée est un enfant.

Quand peut-on invoquer le fondement de l’intérêt légitime ?

Par conséquent, cette base juridique peut être utilisée, sous réserve des principes généraux de traitement et à condition que l’intérêt légitime du responsable du traitement ne sera pas depasé  par les intérêts des personnes concernées.

Afin d’invoquer avec succès le fondement de l’intérêt légitime, il doit être démontré que le responsable du traitement, ou un tiers, poursuit un certain avantage clairement articulé, le traitement à cette fin est légal et, plus important encore, que cet intérêt au traitement des données personnelles ne prévalent pas sur les intérêts légitimes des personnes concernées.

Les avantages de l’utilisation de la base de l’intérêt légitime

Contrairement aux autres motifs énoncés dans le règlement, l’intérêt légitime n’a pas de caractère spécifique, englobant un large éventail de contextes juridiques. En raison de cette nature flexible, de plus en plus d’opérateurs choisissent de l’invoquer lors du traitement des données personnelles.

Par exemple, l’intérêt légitime peut être utilisé lorsque le traitement n’est pas requis par la loi, mais présente un avantage pour le responsable du traitement ou d’autres personnes, lorsqu’il a un impact limité sur la vie privée de la personne concernée ou lorsque le responsable du traitement ne peut / ne veut pas contrôler totalement à la personne concernée (par consentement) le traitement qu’il effectue.

Les limites dans lesquelles nous pouvons invoquer le fondement de l’intérêt légitime

Cependant, l’intérêt légitime ne peut être utilisé à sa discrétion, et ne peut être utilisé que sous certaines conditions, en rapport avec les faits. Ainsi, compte tenu des circonstances et du domaine d’activité du responsable du traitement, les intérêts de l’entreprise traitant les données à caractère personnel doivent être mis en balance avec les intérêts individuels des personnes concernées et seulement alors, si le test de mise en balance montre la prédominance des intérêts de le responsable du traitement, l’intérêt peut-il être invoqué sur une base légitime pour le traitement des données à caractère personnel.

Motifs d’intérêt légitime vs motifs de consentement.

L’invocation de l’intérêt légitime présente, par rapport aux autres fondements juridiques, à la fois des avantages et des inconvénients. Par exemple, par rapport au consentement de la personne concernée, qui, une fois retiré, le traitement ultérieur des données à caractère personnel est illégal, la base de l’intérêt légitime peut continuer à fonctionner même si le consentement de la personne concernée est retiré.

La base de l’intérêt légitime a l’avantage de la flexibilité, offrant une marge d’utilisation assez large, par opposition à la base du consentement qui établit des conditions spécifiques que l’opérateur doit respecter en ce qui concerne l’information des personnes concernées, la récupération et la suppression des données fournies .

Évaluation de l’intérêt légitime.

D’autre part, précisément cette flexibilité de l’intérêt légitime entraîne l’obligation pour l’opérateur de passer par une procédure d’évaluation élaborée et documentée (Évaluation de l’intérêt légitime (LIA) avant d’opter pour l’utilisation de cette base légale. Ainsi, alors que pour les autres bases juridiques il existe une présomption d’équilibre entre les intérêts de l’opérateur et ceux de l’individu, dans le cas de l’intérêt légitime cet équilibre des intérêts doit être prouvé.

Essai d’équilibrage.

Afin de démontrer un intérêt légitime, un test comparatif est nécessaire pour vérifier dans quelle mesure les intérêts de l’opérateur et de la personne concernée sont équilibrés.

Bien que non expressément réglementée dans le RGPD, la réalisation de ce test comparatif (test d’équilibrage) est recommandée aux opérateurs avant de recourir à l’intérêt légitime et s’effectue en règle générale en 3 étapes : test de finalité, test de nécessité et enfin, test d’équilibrage.

À l’aide du test comparatif,  on analyse s’il existe un intérêt légitime du responsable du traitement, si le traitement des données est nécessaire pour cet intérêt légitime et si l’intérêt du responsable du traitement est en équilibre avec celui de l’individu, en évaluant l’impact potentiel du traitement sur les personnes concernées. En fonction du résultat obtenu, il sera décidé si oui ou non le traitement des données peut effectivement être fondé sur l’intérêt légitime.

En conclusion, bien que la base de l’intérêt légitime soit la base la plus flexible pour le traitement des données à caractère personnel et qu’il soit recommandé de l’utiliser lorsqu’il existe une finalité claire du responsable du traitement et un impact minimal sur les personnes concernées, il est néanmoins noté que cette flexibilité nécessite au en même temps et une responsabilité accrue de la part de l’opérateur, en démontrant la légalité du traitement et en respectant l’équilibre entre ses intérêts et ceux des personnes concernées.

30.06.2021